Aujourd’hui, nous avons l’immense plaisir de partager, avec vous, une interview riche et sincère d’une grande championne de motocross : Mélanie Perez
WKX Racing : Bonjour Mélanie, peux-tu te présenter en quelques mots ?
Mélanie Pérez : Bonjour ! et bien je m’appelle Mélanie PEREZ, j’ai 32 ans, je suis passionnée de Sport en général, mais plus particulièrement mordue de Motocross et de Boxe anglaise ! Je pratique le Motocross au niveau national et international. Et j’ai été titrée en Boxe sur différents tournois.
Je me suis souvent blessée dans mes différentes carrières sportives, ce qui, m’a naturellement dirigée vers un métier de soin. Je suis Ostéopathe, où je me suis spécialisée dans des techniques correspondant à l’usure de mes sports. La pathologie vertébrale et la décompression axiale sont mes valeurs professionnelles.
Peux-tu rappeler ton palmarès en motocross ?
Je suis championne de Provence – Je suis d’ailleurs la première femme dans l’histoire de la Ligue de Provence à remporter une manche en mixte !
Mon meilleur classement général au France c’est 7
Mon meilleur classement de journée au France c’est 4 (pff le pied du podium!)
Mon meilleur classement en Mondial : 19
À quel âge as-tu commencé la moto ?
C’est une question un peu complexe car je n’avais pas le droit d’en faire dans un premier temps ! Donc ça a été une bataille avec mon papa dès le début (lui, faisait de la moto en plus !). J’ai réussi à avoir un 80 PW à mes 8 ans, que j’ai gardé jusqu’à mes 14 ans. Mon papa ne voulait pas m’en prendre une autre, il savait que je rêvais de faire des compétitions, mais une femme n’a pas sa place avec les hommes en Motocross. J’ai donc galéré jusqu’à mes 14 ans pour gagner des sous à droite à gauche pour enfin à Noel arriver à financer mon premier 85 YZ et après un peu de chantage auprès des parents (sourire)...
J’ai réellement pu faire ma première compétition (d’endurance et pas de motocross) à 16 ans.
J’ai attendu le 1 er Avril 2007 (17 ans) pour faire ma toute première compétition de Motocross au MINICROSS de PROVENCE de PERTUIS(84).
Après j’ai eu 18 ANS, et j’ai pu me déplacer seule sur mes compétitions et enfin me gérer seule !
Peux-tu nous en dire plus sur l’achat de la 85YZ ?
Comme je le disais plus haut, j’ai enchainé les petits boulots dès mon plus jeune âge. À peine j’avais eu le 80 pW que je convoitais le 80 YZ de l’époque, cachée dans les toilettes à feuilleter les annonces d’occasions sur MOTOVERTE. Je savais ce que ça coutait (12000 FRANCS environ, et oui, c’était une autre époque on était en 1998 ! (rire)). J’ai donc commencé à faire des bouquets de lavande l’été, je les vendais à la station de mes grands-parents lorsque je leur servais l’essence. J’avais des petits pourboires de temps en temps, je lavais aussi les voitures des clients, qui me laissaient des pourboires. Tout était stocké dans une tirelire et compté régulièrement (rire).
J’ai même rangé tout un été la casse automobile de mon grand-père, j’ai rempli des bennes entières de pneus usagés pour le recyclage, qui était la grande nouveauté des années 2000. Sinon les pneus étaient jetés dans un champs derrière le garage depuis toujours. J’avais eu un peu d’argent encore ! J’ai ramassé des feuilles de châtaigner pour les fromages, j’ai travaillé dans les lavandes… Et après des années de petites économies de vacances, et de mes Noëls, nous voilà Noël 2004, ou ma grand-mère et ma mère ont joué le jeu de combler ce qu’il manquait pour l’achat du 85 YZ de Soubeyras chez Yam 84, à 2200 € ( j’avais 1800 donc je pouvais prendre qu’une moto plus vieille) On a coincé mon père, et j’ai ENFIN eu mon 85 , que j’ai gardé jusqu’à mes 16 ans, et ou j’ai dû recommencer le même sketch pour changer de moto ( toujours sans compétitions bien entendu !).
Outre la boxe et le motocross, as-tu, par le passé, pratiqué d’autres sports ?
Comme je vous le disais, je suis passionnée de sport avant tout. J’aime le dépassement de soi, la découverte d’autres disciplines, et par-dessus tout : j’aime le travail technique et physique que chaque sport génère. C’est passionnant, surtout pour une Osteo, de travailler le mouvement parfait ! Et cela inclus tellement de facettes d’entraînement…Je touche donc un peu à tout .
J’ai fait 3 ans de Natation en compétition au lycée, des années de football, ou j’ai été sélectionnée pour jouer à des niveaux supérieurs, les premières équipes féminines de foot j’en ai fait partie ! Et j’ai tout arrêté quand j’ai pu enfin rouler en compétition ! Pourtant, j’adorais ça et je n’étais pas mauvaise du tout ! J’ai fait 5 ans de BOXE ANGLAISE en compétition, quand je n’avais plus les moyens financiers de me payer une saison de motocross, j’ai dû tout revendre. Je me suis donc passionnée de sport de combat. Et honnêtement c’est devenu viscéral, comme la moto. Sans l’équilibre boxe/moto je suis malheureuse !
Je ne vous ferai pas le listing, mais j’ai tenté le volleyball, j’ai fait du tennis et du ping-pong ou j’ai fini championne une année au collège, j’ai fait du triathlon ( mais, ça, c’était une ambiance trop étrange, ça n’a pas duré), des courses à pieds, j’ai même tenté le basket, mais là, j’étais mauvaise (rire).
Comment te sens-tu pour la saison à venir ?
Déterminée. 2 saisons que j’enchaine les galères. Cet hiver on a mis les petits plats dans les grands. J’ai repris la Boxe dans mon entrainement physique pour la moto, j’ai retrouvé la famille de la boxe, et je vous avoue que j’ai la rage et je me suis bien musclée ! Le résultat sur la moto est de mieux en mieux et en constante évolution. J’ai repris toutes les bases, et adapté tous mes réglages. J’espère que cela portera ses fruits ! En tout cas, l’envie est là !
Que penses-tu de l’ambiance Femme/Homme dans la moto ?
Lourd et LONG sujet. Elle a changé en 15 ans. Avant, les hommes nous respectaient, respectaient le fait qu’on finisse devant, et ça les faisait sourire ! Ils nous encourageaient à aller plus loin, à nous imposer. On a été accueillie merveilleusement bien et c’était motivant. Aujourd’hui c’est devenu différent, il y a toujours un joli regard de certains, mais beaucoup nous mettent des bâtons dans les roues, car il ne faut surtout pas finir derrière la gonzesse. Alors ça devient dangereux.
Je regrette qu’en 15 ans de temps, et ayant connu cet essor de notre discipline, que nous n’ayons toujours pas des conditions de roulages égales aux hommes. Nous sommes deux catégories à part entière, nous effectuons les mêmes entrainements que les hommes, nous dépensons le même budget voire plus parfois pour adapter les motos et nous entraîner, mais nous n’avons pas la reconnaissance voulue, ni même les financements pour avancer plus. Comme si on nous empêchait d’avancer trop vite. Pour moi, comme en boxe, les femmes se battent avec les femmes et les hommes avec les hommes, mais il n’y a pas qu’un seul combat phare. Il y en a deux. LA CHAMPIONNE qui met sa ceinture en jeu, et le CHAMPION, qui remet sa ceinture en jeu. Ça fait des années qu’on demande à être avec l’élite pour plus de visibilité. C’est dommage que ça n’aille pas plus vite, je suis bientôt à la retraite et je ne connaîtrais pas cette arrivée du sport féminin, payé et médiatisé. Mais je sais que j’aurai lourdement participé avec mes copines à faire entendre nos voix, je le fais encore au travers de mes réseaux, j’ai même récemment décidé de communiquer sur YouTube. Pourquoi ? Parce que si on ne fait pas notre communication nous-même, pas grand monde parle de nous !
Ton meilleur souvenir en tant que pilote ?
Je n’en ai malheureusement pas qu’un … Mais si quelque chose doit sortir, c’est ces premières années au championnat de France féminin. 2009 : ce premier championnat FEMININ, qui n’existait pas et qui prend forme. À une époque ou internet n’est pas encore au top , on ne savait pas qu’on était autant de filles en France à rouler comme ça ! Je me sentais tellement seule dans ma discipline que je rêvais de rencontrer d’autres filles comme moi, passionnées de motocross et de sport. Cela me semblait impossible.
Et puis…à l’initiative de Pauline Blanchet, il y a eu ce rassemblement à Château Gontier en 2007 (je commençais à peine les compétitions mon père n’avait pas voulu m’y amener), ce qui a donné en 2008 un « trophée » de France avec, je crois 3 épreuves dont Lacapelle Marival ou j’avais pu me rendre avec les deux autres filles de ma ligue qui étaient déjà mes super copines (Annabelle Simonet et Eldie NOVI).
En 2009, vu l’engouement des 3 épreuves « TEST » de 2008, on a OBTENU NOTRE CHAMPIONNAT. Avec ce que je viens de vous dire, imaginez simplement ce bonheur de pouvoir rouler entre nous, et se dire que wouah, mais il y a du niveau en fait ! On était AMIES, on était SOUDÉES… Mais une fois le casque mis, on se battait pour nos classements et nos places. Et, ça…. ça c’est réellement le meilleur souvenir de toute ma carrière. Si les filles de l’époque lisent cette interview : JE VOUS AIME ! ET MERCI POUR TOUT CE PARTAGE !
A noter qu’en 2013 j’ai eu la chance de participer aux Nations Féminines à Castelnau après un appel du club 3 jours avant, car il y a eu un désistement et ils m’ont choisie. Imaginez ce bonheur quand on t’appelle pour te dire, vient on te veut, on te défraie pour venir… WAOUH je suis désolée, mais je n’avais jamais eu la prétention de rêver autant !
As-tu un pilote préféré ?
Je n’en ai pas vraiment, j’aurai tendance à catégoriser par leur qualité, ou leur style.
J’ai grandi avec le pilotage d’Everts et de Livia, ce côté fluide, ou t’as l’impression qu’il n’y a rien, pas un trou, qu’ils ne se fatiguent pas, et qu’ils ne sont même pas en train de faire le chrono de leur vie (rire), sauf qu’ils étaient toujours devant avec un boulevard !
Stewart pour son flow, Carmichael pour son agressivité et sa façon si particulière de rouler avec un guidon si bas ! Tortelli pour son mental et son physique de guerrier, qui sait en imposer grave sur la piste ! McGrath et Vuillemin, pour le paris Bercy de furieux de l’époque !
Roczen pour sa façon impériale de passer les whoops
Ça dépend vraiment des contextes, mais en général c’est la capacité technique qui me fait rêver.
Voici quelques petites questions détentes pour finir : Quel est le meilleur selfie que tu as fait avec une personnalité ?
Là comme ça je n’ai pas vraiment d’idée, mais bon. Il y a une photo qui m’a marquée, c’est celle avec Sébastien Tortelli. À l’endurance de MAZAN, je devais avoir 16 ou 17 ans, et j’ai une tête de nana super fière et gênée Surtout que…C’est un très bel homme, personne ne dira le contraire ! (rire)
Une anecdote ou un souvenir amusant à nous raconter ?
Championnat de France 2009, CUSSAC Des trombes d’eau, un terrain détrempé, et une montée impossible
Toutes les filles étaient coincées dans la montée, elles avaient abandonné l’idée d’arriver en haut et attendaient la fin de la manche ! et il y avait Mélanie PEREZ, qui amusait la galerie : je montais, je tombais… je redescendais, je remontais…je tombais …Sincèrement j’ai dû essayer 6 ou 7 fois facile ! ELDIE mon amie de toujours, me disait « Mel arrête, t’es folle laisse tomber !! » Puis j’ai réessayé… Quand je suis arrivée en haut, j’ai pris le temps de m’arrêter, de la regarder et de lui faire un petit fuck pour rigoler. Elle était morte de rire, parce que j’avais joué ma vie pour lui prouver qu’elle avait tort d’abandonner. J’avais d’ailleurs récupéré pas mal de points grâce à cette course du coup ! (rires)
Une autre quand même … 2012, BROU
C’était mon anniversaire et un weekend de trois jours avec l’épreuve le lundi avec les juniors. Vu la cohésion de l’époque, on s’est toutes données RDV le samedi. On a demandé à l’organisation de course l’autorisation d’organiser une petite soirée ou tout le monde était convié sur le paddock. J’étais DJ pour payer mon championnat, et on m’avait branchée sur le fait d’organiser ce type d’événement !
On est donc monté à deux camions, avec la famille RICHARD, qui m’a filé un coup de main de fou furieux cette saison-là. On était une vraie team avec une famille d’adoption pour moi sur les terrains, un contrat Suzuki France et un soutien sans faille de la part de ces adorables personnes. Bref, la soirée se fait, tout le monde est heureux, il y a un monde de fou à la tente, les juniors / les féminines / les parents / les commissaires…La machine à fumée n’a pas fonctionné de la soirée tant les gens dansaient et levaient la poussière du terrain ! C’était DINGUE ! Quand j’ai coupé le son à 23H30 comme entendu parce que bon…on roulait le lundi quand même, tout le monde en demandait encore, et je me rappelle même de certaines mamans qui ramenaient leurs maris au camping-car en leur tirant les oreilles ! une ambiance de partage encore dingue ! et sincèrement ces années étaient les meilleures !
Préfères-tu effectuer un 30m en motocross ou prendre 300km/h sur piste ?
Franchement ? Pourquoi choisir ? LES DEUX ! (Bien que je n’ai jamais atteint les 300 km/h, sincèrement si un jour on me propose un contrat pour rouler en piste ou en supermot, je serai super heureuse de découvrir la discipline ! j’ai bossé en Osteo pour les teams de piste, je connais le milieu et c’est TOP !
Une question que l’on ne t’a pas posée ?
(Rires) je pense que je vous en ai déjà bien raconté !
Un message à faire passer à celles et ceux qui voudraient se lancer dans la moto en compétition ou même en loisir ?
Ne vous arrêtez jamais en bas des obstacles, il n’y a pas de rêve trop grand ou trop petit. Il y a des objectifs. Et si vous ne vous arrêtez jamais, et que vous vous relevez à chaque fois, vous viendrez à bout de vos objectifs ! je n’avais pas le droit de faire de la moto, mais j’avais un rêve… je n’avais pas les conditions idéales ni même le soutien moral pour devenir championne, mais j’ai quand même réussi à faire pas mal de choses, j’ai même pu rouler en mondial avec les meilleures et je continue de m’y qualifier !
Alors oui, être championne de France ou du monde, c’est trop demander, mais travailler pour faire de meilleurs résultats d’année en année pour se rapprocher de son rêve…ça c’est permis ! Il ne faut juste pas écouter les critiques, qui vont te détourner de ta voie principale en te disant que tu n’y arriveras jamais, et plus particulièrement, après un échec ! C’est le sujet de ma prochaine vidéo. Si vous saviez le nombre de personnes qui essaient de me dévier de ma route en me disant le plus souvent que j’ai bientôt 33 ans que je ne ferai plus rien en résultats et qu’il faut que je me consacre à mon travail et à faire des mômes ! (Rires) Vous seul savez qui vous êtes, ce que vous voulez devenir, et ce que vous mettrez en place pour le faire. Cela prend parfois des années. Mais ça arrive ! (je vous l’ai dit, j’ai dû arrêter la moto faute de finances…et je suis où aujourd’hui ? à la moto…) Rien n’est mauvais dans la vie, il faut toujours continuer d’avancer !
Un dernier mot pour la fin ?
Merci de m’avoir sollicité pour cette interview, elle me permet de faire jaillir des souvenirs et de les partager à qui voudra bien les lire !
Merci de considérer le sport au féminin et de nous accorder ce moment.
J’espère que mes résultats cette année vous montreront qu’il n’y a pas d’âge pour progresser !
A bientôt sur les terrains !
Merci à toi, et toute l’équipe WKX Racing te souhaite le meilleur et nous espérons que tout ce que tu entreprendras se soldera par un retentissent succès !
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